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Lorsque l’infirmière qui était mon principal soutien a pris sa retraite il y a plusieurs années, j’ai tenté de m’occuper de ma santé mentale sans faire appel au système de soins de santé, en m’efforçant d’affronter toute seule mes problèmes psychiques. Mais l’an dernier, lorsque ma chienne Sally a rendu l’âme, tout cela a changé. Je n’arrivais plus à faire face.
À peu près à la même époque, j’ai déménagé et j’ai commencé à fréquenter un autre centre de santé mentale où j’ai rencontré un nouveau médecin qui m’a parlé de la possibilité d’essayer divers types de traitement. C’était une rencontre informelle qui devait rester sans suite pendant plusieurs mois.
En fin de compte, le médecin qui m’a reçue pour ma visite de suivi était un docteur qui me connaissait non seulement en tant qu’ancienne patiente à l’hôpital de jour, mais aussi parce qu’il avait été l’un de mes psychiatres. Je crois que nous avons été tous les deux surpris de cette coïncidence.
C’est à ce moment-là que les choses ont commencé à devenir intéressantes.
Comme elles étaient manuscrites, le médecin n’a pas pu prendre connaissance de mes anciennes notes au dossier et donc, même s’il me reconnaissait, il n’avait accès ni à mon diagnostic, ni à mes traitements antérieurs. Voyant cela, il s’est dit que ce serait peut-être une bonne occasion de réévaluer mon diagnostic. Après tout, puisque de nombreuses années s’étaient écoulées, il se pouvait fort bien que mon état ait changé depuis, ou encore que je présente des symptômes d’une autre affection mentale, en sus de ceux que l’on m’avait déjà diagnostiqués.
Je n’ai jamais été au courant de la manière dont mon diagnostic initial a été posé. En fait, il a fallu que j’insiste énormément juste pour qu’on daigne me dire quel était ce diagnostic. Par conséquent, l’idée d’en recevoir un autre complètement différent ne m’a jamais traversé l’esprit auparavant.
Mais depuis ce temps, la pensée que je puisse être atteinte d’une affection mentale différente m’a laissée dans l’incertitude et, en attendant d’avoir une réponse, j’essaie d’assumer le bon et le mauvais côté des choses.
On dit souvent qu’il vaut mieux commencer par les bonnes nouvelles. Cela tombe bien, car j’ai trouvé plusieurs points positifs dans le fait de subir une nouvelle évaluation diagnostique.
Comme je l’ai dit déjà, on ne m’a jamais informée sur la manière dont mon diagnostic a été posé. Mais cette fois-ci, je sens que je fais davantage partie du processus. Le seul fait qu’on m’ait dit que mon diagnostic allait être réévalué a fait en sorte que je me sente concernée.
On m’a également donné un questionnaire à remplir à mon propre rythme et dans lequel je dois expliquer, dans mes propres termes, comment je vois la vie et le monde qui m’entoure. Comme j’ai toujours été le genre de personne qui a de la difficulté à exprimer tout haut ce qu’elle ressent à l’intérieur, j’ai trouvé cet exercice très utile.
Ce questionnaire m’a permis de me remémorer mon enfance et de parler des choses qui me reviennent de cette époque. Tout y est passé : depuis l’idée que mes camarades avaient implanté un lecteur de pensées dans mon cerveau à cette enseignante tyrannique qui se montrait peu aimable en raison de ma dyslexie et dont le comportement confortait mes compagnons de classe dans l’idée qu’ils pouvaient me traiter de la même manière qu’elle. En participant au processus de réévaluation de mon diagnostic avec les médecins, j’ai pu être à même de voir à quel point ces événements avaient affecté ma santé mentale par la suite.
Bien sûr, la chose la plus importante de toutes peut-être, c’est que le résultat du questionnaire — quel qu’il soit — me donnera une meilleure idée de ma situation actuelle et me permettra d’avoir accès à des services, des traitements et des médicaments qui pourront mieux traiter mon affection.
Certaines parties du processus de réévaluation du diagnostic ont eu des effets à la fois positifs et négatifs. Par exemple, même si j’en comprends la raison, il est difficile pour moi d’admettre qu’on puisse choisir de parler à ma famille en mon absence.
Je sais que cela leur permettra d’avoir une meilleure idée de la personne que je suis et de ma situation, mais je dois dire que la pensée que des gens « parlent de moi dans mon dos » me rend anxieuse. Je suppose cependant que c’est l’inconvénient avec l’anxiété. On a beau tout faire pour tenter de se raisonner, elle ne disparaît pas pour autant. Il faut juste apprendre à vivre avec elle.
La partie la plus difficile dans tout cela, c’est de penser qu’il se peut que pendant toutes ces années, mon diagnostic n’ait pas été le bon.
Si je reçois un diagnostic différent, cela fait-il de moi une personne différente?
La réponse est non, bien sûr. Je suis toujours Sarah. Mon diagnostic initial pouvait être traité, donc cela ne signifie pas que je n’en ai jamais souffert; cela veut simplement dire qu’il est possible que j’aie appris à y faire face, si bien qu’aujourd’hui, je ne présente plus de symptômes ou je ne réponds plus tout à fait aux critères diagnostiques.
Je me pose encore des questions sur mon identité. Dans un recoin de mon esprit se cache toujours un petit démon qui surgit de temps à autre en me demandant : « Mais toi, qui es-tu au juste si ton diagnostic change? Qui étais-tu pendant toutes ces années? »
Même si la réévaluation d’un diagnostic peut-être une chose difficile en raison des doutes que cela sème sur le passé et l’avenir, au bout du compte, c’est une bonne chose. Tout le monde évolue et, à mesure que nous changeons, nos besoins changent aussi.
Une fois le processus de réévaluation terminé, je saurai mieux qui je suis et j’aurai une meilleure compréhension de ma maladie. Cela me permettra donc d’obtenir exactement l’aide dont j’ai besoin, et c’est à cela qu’il faut que je me rattache pendant la durée du processus. Tous ceux qui, comme moi, passent par ce processus doivent se rappeler que celui-ci n’a pas pour but d’effacer votre passé, mais plutôt de vous aider à grandir.