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La culpabilité du survivant peut ajouter au sentiment de chagrin et de perte. Voyons ce qu’on peut y faire.
Il y a quelques semaines, j’ai appris le décès de mon amie Saima. C’était un dimanche soir. J’avais passé la journée à faire de menus travaux dans l’appartement et à m’emporter contre des choses sans importance quand tout à coup, un ami m’a fait parvenir la nouvelle par messagerie vocale.
Soudainement, tous mes tracas de la journée s’envolèrent. Quel privilège pour moi que d’avoir la possibilité de m’inquiéter des minuscules détails de la vie. Quel privilège que d’être en vie et de m’énerver à cause de choses stupides comme l’entreposage de mes chaussures ou un mur ayant besoin d’être repeint, alors que l’une des nôtres avait rendu son dernier souffle à l’âge de 31 ans.
Saima était un tour de force absolu qui avait reçu un diagnostic de cancer pulmonaire de stade 4 avant même d’avoir atteint ses 30 ans. Bien en vue dans la communauté des gens atteints du cancer, on la connaissait comme quelqu’un qui parle avec verve et passion du vécu des personnes de couleur atteintes de cancer. Elle parlait des disparités qui existent entre sa communauté et celle des Blancs, et s’efforçait de briser le tabou, si présent dans plusieurs cultures, voulant qu’on ne parle pas du cancer.
Elle était à la fois une pionnière, quelqu’un qui fait changer les choses et une très bonne personne. Nous sommes tous très profondément affectés par sa perte.
La perte de Saima n’est pas la seule que j’aie connue au cours des dernières années. La communauté des personnes atteintes du cancer, et plus particulièrement la jeune communauté, qui utilise Instagram pour communiquer, forme un groupe tissé serré, et l’un des problèmes quand on en fait partie, c’est que des gens meurent.
Des gens que vous connaissez meurent.
J’ai 31 ans et j’ai vu beaucoup trop de mes pairs mourir d’une maladie qui, pour une raison ou une autre, m’a épargnée. Et le fait d’avoir eu la vie sauve s’accompagne de tout un tas d’émotions complexes qui, chaque fois qu’une personne que je connais meurt, me prend vraiment beaucoup de temps à démêler. La tristesse, la colère, la crainte et l’affliction se confondent en un immense désordre que je dois arriver à gérer.
Et en plus de cela, il y a toujours la culpabilité.
La culpabilité du survivant a été un gros problème pour moi au cours des dernières années. C’est un problème fréquent, que l’encyclopédie libre Wikipédia définit comme étant un syndrome douloureusement ressenti par les personnes qui ont survécu à une situation grave alors que d'autres sont morts. En général, elle est associée au trouble de stress post-traumatique (TSPT) lié à un accident grave ou à des conflits mondiaux, mais elle tend aussi à devenir de plus en plus souvent associée à la survie au cancer.
Voilà bien une situation délicate.
Si vous demeurez dans la communauté, vous vous lierez à des gens que vous allez rencontrer et qui ne survivront pas. Alors que choisir? Se protéger de la culpabilité du survivant en esquivant la situation ou rester dans la communauté et rencontrer des personnes formidables qui vivent avec le cancer et même au-delà? Pour moi, cela va de soi. J’ai rencontré tellement de personnes géniales que j’ai décidé d’essayer d’assumer la culpabilité, plutôt que d’essayer de m’empêcher de la ressentir.
Depuis un temps déjà, j’essaie, avec mon amie Sophie Trew qui m’accompagne dans ma démarche en matière de cancer et d’état d’esprit, d’assumer certaines des tribulations qui tourmentent ceux qui survivent au cancer. En travaillant avec elle, j’ai appris un certain nombre
de choses sur la culpabilité du survivant. Ces choses, j’en ai fait un recueil de conseils qui pourraient vous aider si vous aussi vous avez du mal avec ce problème.
Tout d’abord, lorsque ces sentiments de culpabilité surgissent, il est très important de se parler comme on le ferait avec un être cher. J’ai tellement plus d’empathie pour les autres que pour moi-même et je suppose que je ne suis pas la seule dans cette situation.
Donc je songe à ce que je dirais à un autre membre de la communauté qui affronte le double dilemme du chagrin et de la culpabilité du survivant, et j’applique cela à moi-même. Je me dis que j’ai le droit de ressentir ce que je ressens et que personne n’est à blâmer. Le cancer est une bête rusée qui fauche des vies sans rime ni raison. Y survivre n’a rien de honteux.
Comme le dit le vieil adage, un problème partagé est un problème à moitié résolu. Lorsqu’on fait part de ses sentiments à autrui, on se sent moins isolé, et il y a de bonnes chances que si la personne à qui l’on s’adresse a elle aussi survécu au cancer, elle ressentira exactement la même chose ou l’aura ressentie un jour ou l’autre. Sophie est souvent la première personne vers qui je me tourne pour ce genre de conversation et, honnêtement, je me sens toujours le cœur plus léger après.
On se sent souvent coupable de se dire qu’on ne devrait pas ressentir ceci ou cela, mais pour gérer ces émotions, il est essentiel de prendre le temps de les vivre. Il est vrai aussi que la culpabilité du survivant est une émotion qui est intimement liée au chagrin. C’est pourquoi il est primordial de s’arrêter un moment pour bien faire le tri dans ses sentiments de peine. Dans les jours qui ont suivi le décès de Saima, je suis allée nager à plusieurs reprises, afin de me rappeler le bonheur d’être en vie et de respirer à pleins poumons. Chaque longueur, je la faisais pour elle.
Lorsqu’on est dépassé par les événements, il peut être utile de se créer une routine quotidienne dans laquelle on inclut des choses que l’on aime faire. Cuisiner par exemple, ou faire du jogging ou du yoga. Lire ou écrire sont deux activités que vous pourriez trouver apaisantes. Trouvez du temps, parmi vos autres engagements, pour faire chaque jour des choses qui vous permettent de vous sentir plus équilibré, peu importe ce dont il s’agit. C’est une bonne manière de rendre plus légères les choses qui nous accablent.
Et pour finir, même si cela peut vous sembler être le cas, vous n’êtes pas tout seul. De nombreuses personnes ont vécu des choses semblables à celles que vous vivez et sauront ce que vous ressentez. Qu’il s’agisse d’un ami personnel ou d’un professionnel, demandez-vous à qui vous pouvez faire appel. Et si vous n’arrivez toujours pas à trouver quelqu’un qui vous comprenne, vous pouvez toujours me trouver sur Instagram.